Parfois, il serait peut-être mieux d'ignorer son histoire, ce qui fait que vous en êtes là où vous êtes aujourd'hui. D'après certaines personnes, la plupart des jeunes filles suivent la trace de leur mère. Mais ce n'est pas toujours par choix. En ce qui me concerne, quelqu'un l'a choisis pour moi.
Je suis née à Saint-Pétersbourg, dans cette grande ville qui, quand on la connait bien, est assez plaisante, et je dirai même chaleureuse. C'est en tout cas ce que ma mère, Irina, me racontait le soir avant de m'endormir. C'était certainement la seule chose qu'elle faisait bien avec moi, parce que pour ce qui était de mon éducation, j'avais la chance d'avoir une voisine qui désirait plus que tout avoir une petite fille. Mais comme quoi, ce ne sont pas toujours ceux qui le désire le plus qui ont des enfants. Elle m'avait comme adoptée, elle m'apprenait les vraies choses de la vie, comme elle disait.
Oh, vous vous demandez peut-être pourquoi je n'ai pas encore parlé de mon père? C'est simple, je n'ai pas la moindre idée de qui il est. Enfin si, certainement un homme fortuné, qui désespérait de trouver une femme pour l'aimer parce qu'il était bien trop orgueilleux et ennuyeux pour qu'une demoiselle ait un quelconque intérêt pour lui. Alors il s'est rendu au Moulin Rouge, en France, et en sortant, juste devant, il a vu ma mère, qui à l'époque travaillait à Paris. Oui, passer la nuit avec des hommes, c'était son travail. Je ne sais pas comment c'est arrivé, mais lorsqu'elle a apprit qu'elle était enceinte, ma mère a dû quitter cette ville que l'on surnomme la Capitale de l'Amour, et retrouver St Pétersbourg où elle était née et où, après sa grossesse, elle était certaine de trouver à nouveau du travail. Heureusement pour elle, elle était assez connue et apprécié dans ce milieu de luxure, ce qui fait que nous avions toujours l'argent dont nous avions besoin.
Je suppose qu'avec une mère comme la mienne, on ne peut qu'être dégoûtée de tout ça, et tout faire pour ne pas se retrouver au même endroit. Et ça aurait pu être le cas, sauf qu'il y a dix ans, avant l'incendie au cabaret Araskov, ma mère avait signé un contrat qui stipulait qu'elle en avait encore pour minimum quinze ans. Quinze ans … Elle n'a pas vécut jusque là.
Je n'ai pas fais de grandes études, je suis allée jusqu'au lycée, parce que c'était gratuit et que notre chère voisine, Poliska, avait insisté. Tous les soirs, je rentrais de l'école et je disais au revoir à ma mère qui partait dans une tenue bien trop dénudée,et le matin je me réveillais et voyait chaque jours un homme différent sortir discrètement. Le plus étonnant, c'était qu'elle semblait aimer ce qu'elle faisait.
Un jour, trois ans après la mort de ma mère, un homme, Victor Kniasev , est venu chez moi, il disait qu'il réclamait les quinze ans que ma mère devait au cabaret. Lorsque je lui expliquais la situation, il décida simplement que je devais la remplacer, qu'il n'y avait que comme ça que je m'en sortirai. Je me suis dis que n'importe quelle mère rêve que sa fille suive sa trace … Et il s'avéra rapidement que j'étais très douée, j'avais hérité de tous ses talents. Et je commençais à apprécier tout ça, c'est bon de se sentir désirée, et surtout, d'avoir toujours le contrôle sur les hommes. Peu importe ce que je veux, je l'obtiens, et ce par n'importe quel moyen. Je fais ce que je veux des hommes, ou des femmes. Et ce petit jeu m'amuse. Pas d'attaches, juste de la folie. Pourtant, il a bien une personne avec qui tout cela ne me convient pas. Robert. Cet homme qui rend mes nuits si folles et dont les pensées s'envolent sans cesse vers une autre femme. Je m'étais pourtant jurée de ne jamais m'attacher ou ressentir de la jalousie. Mais il faut croire que certaines choses ne se contrôlent pas. Seulement moi, j'obtiens toujours ce que je désire, et je me moque bien de ce que veulent les autres.